Peu appuyée à Katowice, l’adaptation ne bénéficie toujours pas de l’attention égale à l’atténuation qui lui était promise depuis Cancún. La création de la Global Commission on Adaptation début 2019 et la publication de son premier rapport en septembre marquent une volonté de relancer l’investissement politique et financier dans l’adaptation parmi les instances de gouvernance internationale.

Alors que les coûts de l’adaptation pour les PED augmentent constamment, la communauté internationale tarde à honorer ses engagements financiers : 463 M USD pour le climat en 2016, dont seulement 22 milliards USD pour l’adaptation (= 4,75 %, Climate Policy Initiative, 2017). Bien loin des engagements de 100 milliards/an promis par les pays développés. Pourtant selon la Global Commission on Adaptation, le ratio coût-avantage d’un investissement d’adaptation peut aller de 2 :1 à 10 :1.

Toutes les études sur la finance climat font pourtant état d’une augmentation des financements bilatéraux et multilatéraux alloués à l’adaptation depuis 2016. L’Asie du Sud-Est est le premier continent récipiendaire. En particulier, les flux des NordSud bénéficient de l’augmentation globale des financements climat vers les PED. Néanmoins, ces sommes demeurent plafonnées à de maigres volumes absolus et, en proportion de ce que reçoit l’atténuation, sont loin de marquer un changement d’échelle du financement de l’adaptation. Des institutions bilatérales, comme le UKAid, ou multilatérales, comme le Fond Vert, poursuivent toujours un objectif 50% de financements pour l’adaptation.

Le développement des marchés et garanties d’actifs verts doit permettre de réorienter les investissements privés au bénéfice de l’adaptation, notamment des PMA, tout en réduisant l’exposition du secteurs financiers aux risques physiques auxquels leurs actifs sont exposés.

Dans un contexte de multiplication des fonds dédiés à l’adaptation et de frilosité des investisseurs privés à l’égard des risques-pays élevés, la clarification des critères et la consolidation des outils de suivi peut faciliter le financement de l’adaptation des PMA. Car en l’absence de métrique commune et de méthodologie standard pour évaluer les projets d’adaptation, difficile d’apprécier l’impact des mesures et de suivre les investissements. L’AFD, la Banque Mondiale ou encore le Citepa se sont essayé récemment à développer des instruments à vocation universelle adaptables aux contextes locaux.

Acteurs clés de la résilience des territoires, de plus en plus de villes se déclarent engagées dans une démarche d’adaptation auprès des réseaux et initiatives climat internationaux. Cependant l’ensemble des études académiques produites depuis 2018 sur l’engagement des villes en adaptation observent une moindre attention pour l’adaptation dans les agendas politiques locaux en comparaison aux actions d’atténuation. En l’absence de cadres réglementaires contraignants (imposant par exemple un plan local d’adaptation), la prise d’action volontaire est encore très limitée. 

Si les collectivités européennes et nord-américaines sont les plus promptes à communiquer sur leurs démarches de planification et leurs actions, de nombreuses « adaptation silencieuses » ailleurs dans le monde échappent aux données agrégées. Non répertoriées comme telles, ces actions peinent à accéder au financement. Les collectivités d’Amérique latine se sont montrées très actives dans leur reporting d’adaptation ces dernières années.

Sur le plan de l’action, les villes ont encore du mal à dépasser la phase de diagnostic et à entrer en planification et en mise en œuvre opérationnelle. Les politiques mises en œuvre par les collectivités ont tendance à se polariser sur des risques visibles (notamment ceux liés à l’eau), avec une préférence pour des mesures d’adaptation « grises » bien identifiées, et se concentrent en milieux urbains.

C’est le cas dans l’agroalimentaire, l’industrie touristique ou la production électrique : réduction de la demande et réorganisation de l’offre (moins d’élevage, plus de proximité, décarbonation de l’électricité, etc.) participent d’un même mouvement de réorientation holistique des marchés.

L’éventail de stratégies d’adaptation de certains secteurs ou services ne va pas sans poser quelques questions éthico-politiques : l’usage d’OGM dans l’agroalimentaire, de substituts artificiels à des ressources naturelles (pelouses synthétiques, neige artificielle, etc.), ou même la construction de digues sur des côtes fragilisées… confirment que l’adaptation d’un territoire est une affaire de choix stratégiques et nécessite une gouvernance ouverte à l’ensemble des parties prenantes.