Développement durable • État d’avancement des acteurs de la mode en France

Une première étude, réalisée par Paris Good Fashion x Climate Chance, sur les stratégies et les actions de 24 sociétés, groupes français de la mode, en matière de développement durable, autour de grands enjeux : climat, économie circulaire, eau, biodiversité et social..

Année de publication

2023

Localisation

France

Rédacteur

Paris Good Fashion | Observatoire Climate Chance

Pour la première fois, 24 acteurs français ont accepté de partager leurs données avec l’objectif de mettre en lumière la vision, les stratégies et les avancées des acteurs français de la mode, en matière de développement durable et de RSE.

Méthodologie
D’avril 2022 à avril 2023 : réalisation de 50 interviews qualitatives auprès de marques, distributeurs, experts de l’écosystème puis analyse des données de 24 acteurs (dont 23 membres de Paris Good Fashion, plus Decathlon). Seuls les résultats consolidés sont communiqués.

Principaux enseignements qualitatifs 

  • L’accélération du changement amorcé dans l’industrie est confirmée, propulsée par le réchauffement climatique et ses impacts, les cadres législatifs français et européens, les interventions des activistes, et les demandes des consommateurs et des investisseurs. Dans le cadre du Pacte vert européen (European Green Deal), toutes les industries sont appelées à s’inscrire dans la trajectoire de 1,5 °C de l’accord de Paris, et la mode est pointée du doigt.
  • La particularité des acteurs de la mode est une forte prédominance familiale dans leur capital, ce qui se traduit par un engagement des directions en faveur du changement.
  • La reconnaissance de la fonction RSE au plus haut niveau et les bons résultats enregistrés sont contrebalancés par de nombreuses interrogation, l’ampleurs de la tâche, la multiplication des injonctions économiques et législatives et la difficulté des décisions à prendre.
  • L’une des particularités de l’industrie de la mode, qui explique en partie la fascination qu’elle suscite mais aussi la difficulté qu’elle engendre, reste la complexité de sa chaine de valeur, impactant l’environnement et faisant peser des risques sur les droits humains.

Climat : Des progrès réels à intensifier

  • La transparence des acteurs sur leur impact climatique progresse, mais le niveau de maturité des démarches est inégal.
  • Alors qu’en moyenne, les émissions indirectes (Scope 3) – en amont et en aval de l’activité de l’entreprise – représentent plus de 90 % des émissions rapportées, les plans de transition climatique tendent pour la plupart à se concentrer sur les Scopes 1 et 2 à courte échéance (2030).
  • La qualité, la temporalité, le périmètre des objectifs sont extrêmement variables, et ne permettent pas de comparaison ni d’agrégation.
  • Les acteurs du secteur textile – comme dans les autres secteurs – peinent encore à formuler des plans de transition climat à la hauteur des enjeux de long terme (horizon 2050).
  • Les leviers de réduction des émissions directes sont bien identifiés, notamment par l’approvisionnement en électricité d’origine renouvelable, la réduction des besoins de transport et logistique, et l’efficacité énergétique des bureaux et des points de vente. Les leviers d’action les plus efficaces pour réduire les émissions en amont et en aval de l’activité sont auprès des fournisseurs, des consommateurs et des acteurs de la fin de vie.

Économie circulaire : Une priorité 

  • L’éco-conception, la nécessaire transparence et la traçabilité sur l’ensemble de la chaine de valeur sont au cœur des stratégies des acteurs.
  • Deux voies sont clairement identifiées pour réduire l’impact de la production des fibres : l’incorporation de matières recyclées, et le recours à l’agriculture biologique.
  • Parmi les modèles économiques circulaires, les acteurs du panel plébiscitent la combinaison de l’e-commerce et de la seconde main.  Quelques enseignes s’essaient à la location, sur des segments de vêtements à courte durée de vie ou à usage ponctuel. Les services de réparation se développent mais demeurent majoritairement externalisés.
  • La majeure partie des acteurs sont engagés dans des groupes de travail (Paris Good Fashion, Chaire Bali) et/ou au conseil d’administration et dans le nouveau comité des parties prenantes de l’éco-organisme Refashion pour renforcer le déploiement de la filière de responsabilité élargie du producteur (REP) textile en France.
  • Des acteurs s’investissent dans la réduction ou la suppression des emballages des produits en vente, et favorisent l’utilisation de matériaux recyclés pour leurs emballages.

Eau : Un engagement à massifier 

  • A l’échelle mondiale, l’industrie de la mode consommerait 4 % des eaux douces et serait responsable de 20 % de la pollution industrielle des eaux. La lutte contre la pollution des eaux et la réduction de sa consommation est un sujet qui, bien que non encore prioritaire actuellement dans les agendas des responsables RSE, devrait monter en puissance dans les mois à venir.
  • Globalement, si le nombre d’entreprises qui communiquent chaque année des informations sur leurs risques et impacts liés à l’eau augmente, l’intégration de ces questions dans les stratégies du secteur textile reste limitée.
  • En raison de la nature des chaînes d’approvisionnement du secteur, les impacts les plus importants sur l’eau sont concentrés en amont et en aval des chaînes, ce qui laisse moins de possibilités d’action directe.
  • Les objectifs et les engagements des entreprises étudiées pour la réduction de consommation d’eau sont le plus souvent inclus dans les objectifs plus larges d’« éco-conception » ou d’« éco-responsabilité ».
  • Les actions mises en œuvre sont largement concentrées sur l’approvisionnement en matières premières plus « responsables » et sur l’amélioration des processus de transformation.
  • La pollution plastique par les microfibres synthétiques est une question majeure qui suscite tout autant l’intérêt des scientifiques que celui des médias.

Biodiversité : Une action à mutualiser

  • La prise en compte de l’impact de l’industrie textile sur la biodiversité nécessite tout d’abord d’examiner les effets complexes et multidimensionnels de chaque étape de sa chaîne de valeur sur les différents écosystèmes.
  • En amont des chaînes d’approvisionnement, les risques se concentrent majoritairement sur la production des matières premières ; les déchets textiles peuvent également présenter des risques pour la biodiversité.
  • Dans notre échantillon, les actions se concentrent pour une bonne part sur la limitation des risques sur la chaine de valeur (production, bientraitance animale) dans les processus de transformation (teinture, délavage, tannage, etc.) et de production de matières premières.

Social : Dialoguer avec les parties prenantes

  • Dans ce domaine, les données demeurent encore peu explicites. Les 24 acteurs, de par la loi, se conforment au droit du travail en France, en Europe et s’inscrivent dans le respect du droit international du travail et le soutien aux Objectifs du Développement Durable (ODD 8 travail décent, ODD 5 égalité entre les sexes).
  • Ils sont soumis au devoir de vigilance via des études de risques, de résultats et des mesures de correction. Ils s’appuient sur des audits sociaux, des contrôles sur le terrain et veillent à établir une relation/confiance sur le long terme pour s’assurer de la conformité de leur chaine de valeur.